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Interview
l'ours-polar

Interview de Philippe Carrese (suite)

 

A propos de Le bal des cagoles

Cette idée de double narration, de « polar intra-utérin », ça t'es venu comment ?
J'ai trois fils. A chaque grossesse de ma femme, je me suis demandé ce qu'ils pouvaient bien ressentir de la dedans, les sons ? les goûts ? la lumière ? L'idée du livre est venue en discutant avec une libraire de Salon, il y a deux ans. Elle venait de recevoir un livre intitulé « Tout se passe avant la naissance », un de ces livres fait pour culpabiliser un peu plus les femmes enceintes sous prétexte de les informer (ça, c'est ma vision toujours optimiste des choses...). Je n'ai pas lu le livre. Mais j'ai imaginé une histoire où tout se passerait effectivement avant la naissance, et du fait même du bébé. Mais une idée, ça vient avec une accumulation d'événements. Quelques temps plus tard, j'ai fait une intervention dans une école pour gamins à la marge de tout, et j'ai discuté assez longtemps avec une petite cagole des quartiers nord, pleine d'énergie, d'un naïveté absolument affligeante et dont le quotidien (celui qu'elle m'a raconté en minimisant les faits, j'en suis sûr) était un véritable calvaire supporté dans la bonne humeur. Sa naïveté était alimenté par ses seules sources d'informations : les clips de M6 et les journaux du type « jeune et jolie », ces attrapes couillons pour les gamines. A la fin de la discussion, elle s'est levée pour aller en récré, elle était un peu ronde ; Son prof m'a appris qu'elle était enceinte de 6 mois.
Peu de temps après, j'ai fait un bout de documentaire dans la cité Kalisté, au nord des quartiers nord de Marseille. Ouf !!! Sur le terrain, on est loin de l'auto-célébration des oracles officiels et de cet optimisme préélectoral permanent. J'avais le sujet, les personnages et le background pour mon histoire.

Pour la petite histoire, mon personnage de fille s'appelle « Félix ». La fille que j'ai croisé s'appelait « Thomas » et ça m'a surpris. En fait tout le monde l'appelait « Thomas » mais c'était son nom de famille.

« Elle ne comprend rien, pense qu'elle écoute une radio F.M. kurde », tu l'as sortie d'où cette expression ? Car là, rien qu'à la réécrire, j'en rigole encore !

Ma foi ! J'ai imaginé une radio F. Kurde, c'est tout. Il y a des mots qui se confrontent de manière rigolote. Si Kurde s'écrivait avec un « c » au lieu du « k », j'aurais sans doute trouvé autre chose.

Jean-Pierre Gaillard et les cours de la bourse sur Radio France, il te file des envies de meurtre ?
Jean-Pierre Gaillard nous inflige depuis des années une litanie proche de l'endoctrinement religieux et sectaire, incompréhensible pour une majorité de gens. Ce type a l'air tellement content de lui, tellement suffisant, que ça en est indécent. Lui aussi est un oracle officiel (qui ne respire jamais au bon moment lorsqu'il ânonne ses séries de chiffres, ça me fait mourir de rire). Ce type ne me donne pas des envie de meurtres. Personne ne me donne des envies de meurtre, sinon peut-être les valets serviles de l'aberrant système administratif français. Non, là, j'ai plutôt envie de gerber. Et si possible sur Jean-Pierre Gaillard parce que pour parler de manière aussi insupportable, ce type doit faire gaffe aux apparences extérieures et doit avoir des costumes sur mesure payés sur notes de frais. Gerber sur un costume de Jean-Pierre Gaillard !!!

La cité, pourrie, immonde, où « rien ne bouge », c'est le constat que font les minots que tu rencontres ?

Hélas oui. Et encore, j'ai parfois l'impression de minimiser la réalité. Lilvoorde et ses problèmes, tu as suivi l'affaire de près ?
Pas plus que tout le monde. J'ai juste été effaré par la capacité des gens a oublier cette affaire aussi vite, et par la morgue et le culot de « Renault » d'ouvrir très peu de temps après une usine performante en Russie pour y exploiter une main d'oeuvre meilleur marché. De ma vie, jamais je n'achèterai une Renault, même si les autres constructeurs font la même chose.

Ta vision de la femme par le gamin, tu trouves que tu as fait un texte saisissant de réalité ou tu penses avoir exagéré ?

Rassurez-vous, les filles. On va dire que mon descriptif ne concerne que 80 pour 100 d'entre vous.

S'en suit le retour de portrait par la gamine sur les hommes. Encore un texte terrible. Tu t'entraînais pour le jeu des 7 familles ?

Là, par contre, pour les hommes, je monterai la barre à 95 pour 100. Les mecs sont encore plus insupportables et tragiques que les filles. Moi y compris.

Et cette signalétique du « StyX », tu comptes te recycler dans les enseignes lumineuses ?

Créatif en enseignes lumineuses, voila un beau métier plein d'avenir... dans un monde qui s'obscurcit à vue d'oeil.

L'Ours

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