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l'ours-polar |
Interview de Dominique Manotti
Elle a sympathiquement accepté de répondre à quelques questions.
Pourriez-vous vous décrire rapidement ?
Taille moyenne, poids moyen, visage ordinaire, cheveux châtains, quelques mèches grises et yeux bleus. Normale, quoi.
On sait que vous n'avez pas vingt ans, pourquoi êtes vous arrivée à l'écriture si tard ? Et pourquoi écrire du noir ?
J'ai longtemps eu la conviction que je pouvais, que j'allais, participer au changement de la société dans laquelle je vivais, pour ne pas dire à une révolution. J'étais donc une militante très engagée, et je concevais mon métier d'historienne comme un instrument d'élucidation du présent. Aujourd'hui, je n'y crois plus, ou tout au moins pas pour ma génération. Peut-être pour la suivante ? Alors je cherche à raconter ce que je connais de cette société dans laquelle je vis, à tout hasard. Le roman noir me paraît la forme la plus adaptée, et qui me procure le plus grand plaisir.
Vous êtes professeur d'histoire économique du dix-neuvième siècle, pourquoi pas ne pas faire un polar dans ce milieu ?
Que voulez-vous dire ? Un polar historique sur le dix-neuvième siècle ? Ca ne m'intéresse pas pour l'instant. Sur le milieu
Sombre sentier, votre premier roman est naturellement couronné par deux prix. Cela a-t-il, à l'époque, modifié vos projets
Sombre sentier. Quand j'ai eu envie d'écrire un roman noir, il m'a toujours paru évident que je commencerai par raconter le Sentier. Parce que c'est un milieu que je connais bien, pour y avoir eu une activité militante pendant un temps. Et parce que c'est un milieu à la fois violent et chaleureux, hors normes et profondément intégré dans les circuits économiques, extrêmement vivant, régi par ses propres règles, et ancré au coeur de Paris. En fait, le Sentier est à lui seul un personnage de polar, et je crois que, dans Sombre sentier, il a fortement déteint sur tous les autres. Daquin me semble y avoir pris certains de ses traits les plus attachants.
Les prix n'ont rien changé, ni à mon désir d'écrire, ni à ce que j'avais envie d'écrire. Par contre, ce sont les discussions avec mon éditeur et des lecteurs qui m'ont convaincue de reprendre le personnage de Daquin, ce que je n'avais nullement prévu au départ.
Pourquoi avoir créé l'inspecteur Daquin homosexuel ?
Le personnage de Daquin, flic homosexuel, n'est pas venu tout de suite. J'ai d'abord eu le personnage de Soleiman, le jeune homme prostitué occasionnel, et je crois savoir pourquoi : cela m'a toujours profondément exaspérée que l'on considère de façon courante la prostitution comme un
Ensuite, le personnage d'un flic homosexuel me paraissait intéressant parce qu'il introduisait des jeux multiples sur la virilité, les rapports ambigus entre les sexes, les zones d'indétermination et de façons réciproques. Bref un personnage très actuel. Dans un roman de Joseph Hansen, Skinflic Brandstetter, son privé homosexuel, croise un travelo, vedette féminine d'un petit film minable. Echange de regards. Le travelo revient, quelques heures plus tard, habillé en homme, strict. Brandstetter lui dit : « Je vous trouve très bien comme ça. Vous devriez vous déguiser plus souvent ». J'aime bien.
Mais tout ceci n'est sans doute qu'une rationalisation après coup. Les vrais personnages prennent vie dans l'imaginaire de façon assez mystérieuse, à vrai dire. Pour moi Daquin est un personnage familier, et je suis finalement étonnée que la question de son homosexualité me soit souvent posée.
Pour A nos chevaux !, vous explorez le milieu hippique. Seriez-vous une joueuse? Une jockey ? Connaissiez-vous bien ce milieu ou avez-vous travaillé sur des documents ?
D'abord, une petite rectification, le sujet d'A nos chevaux ! n'est pas le milieu du cheval, mais la spéculation immobilière de la fin des années 80... Les chevaux ne sont qu'un
Avec KOP, on change une fois de plus de décor et on part chez les footeux. Il y aurait-il l'opportunisme de la coupe du monde ? Aimez-vous le foot ? Les descriptions du stade sont criantes de vérité, y allez-vous souvent ? lorsqu'on s'était vu aux boréales de Normandie, vous m'aviez confié qu'on vous avait dit que «ce n'était pas votre public», cela s'est-il vérifié ? Quels échos avez vous reçu à propos de ce livre ?
Pas vraiment d'opportunisme. Dès que j'ai commencé à écrire des polars (1993), je voulais un jour écrire sur le foot, et j'ai commencé à accumuler des documents. Je trouve que le foot et son public, le foot et la politique, le foot et l'argent sont des faits majeurs dans notre société, et ce qui m'étonne, c'est qu'il y ait si peu de romans sur ce milieu. Ceci dit, c'est vrai que j'ai cherché à finir mon polar avant la coupe du monde, ça me paraissait de bonne guerre. Mais je n'ai pas eu vraiment d'écho, et je ne sais pas si, finalement, c'était une bonne idée.
Dans vos trois romans, on retrouve l'équipe de l'inspecteur Daquin. Allez-vous en changer ou vous êtes vous trop attachée à ce personnage ?
Je sui effectivement très attachée au commissaire Daquin. Mais j'ai le sentiment d'être allée au bout de la rencontre, et je crois que j'en ai fini avec lui.
Hormis celle publié par nos amis de La Loupiote (Les Visiteurs du noir, Caïn Hors Série n°3, Éditions de La Loupiote), vous n'écrivez pas de nouvelles, car vous m'avez dit ne pas pouvoir faire court. Avez vous changé ?
Non, c'est vrai, je ne sens pas la nouvelle. Ce n'est pas ma distance, et je trouve le genre très difficile. Pour Les visiteurs du noir, je n'ai pas écrit une nouvelle mais un « commentaire de
Travaillez-vous sur un nouveau livre ?
J'en suis au stade embryonnaire. Il portera peut-être sur les trafics d'armes. Tout ce que je sais, c'est que j'en ai fini avec Daquin.
Un grand merci à vous.