SIX-PACK


Six-Pack, un film d'Alain Berberian (producteur : Alain Sarde) avec Richard Anconina, Chiara Mastroïanni et Bernard Fresson. Sortie le 26 avril 2000.

Alain Berberian, réalisateur connu pour des nanars de comédie adaptant « Six Pack » de Jean-Hugues Oppel (Rivages noir) ont aurait pu craindre le pire. Hé bien non : c'est un film recommandable. Croyez-moi, car je suis pistonné et je l'ai vu en avant-première.

L'ambition

D'après le motard barbu (comprenez, J-H Oppel), le « vrai truc de Berberian, c'est le polar. Il a voulu relancer le genre dans le cinéma français en adaptant Six-Pack ». Carrément. Ce film de traque de serial killer, — un thème usé jusqu'à la corde qu'Oppel avait su relever avec brio, ce qui n'est pas peu dire — et de collaboration de services Français et Américains est-il à la hauteur de cette ambition ? On ira pas jusque là, mais comme le dit toujours le principal intéressé (par le succès espéré qui rejaillirait sur des ventes en librairie) « c'est pas un chef d'oeuvre, mais c'est un bon thriller français qui n'a pas a rougir des américains ».
Et de fait, c'est exact, comme on pouvait le dire toujours du bouquin qui n'avait pas du tout à rougir derrière Le Silence des Agneaux.

Photo 4 / cliquez !

Par rapport au bouquin

En fait, Berberian n'a pas pris trop de risques. Il a collé de façon extrême au roman. Tout amateur pointu du style et de l'humour « oppelliens » remarquera même ça et là des dialogues originaux repris in extenso. Des changements par rapport à l'original : Berberian a raccourci l'épisode entre le flic américain et le français, c'est dommage mais ça tient. Il a aussi ajouté une scène ou deux qui ne sont pas dans le bouquin mais tellement bien « oppeliennes » que de l'avis de l'intéressé comme du notre c'est même mieux. Enfin, Saverne est devenu « Nathan », soit Richard Anconina (qui assure, sans plus, mais est bon).

Photo 1 / cliquez

La distribution

Côté distribution, la « chèvre » est jouée par Chiara Mastroianni (craquante affolée) et le lieutenant est Riefenstahl (ou ce genre de nom), le jeune acteur pas mauvais du tout qui joue dans les films de Rochant. Le SK est un acteur britannique dont j'ai oublié le nom mais qui se révèle être génial. Il dit un seul mot dans tout le film et joue tout sur sa gueule laquelle est incroyablement malsaine. (Bref le méchant est réussi donc le film est réussi, disait Hitchcock). Il y a un acteur inconnu incroyable — en fait un réel détenu canadien! — qui joue le SK « Daddy Harry » dans la scène de rencontre dans la prison canadienne (scène écho à celle du Silence des Agneaux entre Hannibal et Jodie),. Le type est absolument saisissant. On ne le voit que quelques minutes, mais c'est du grand trouble. Un dernier détail sur la distribution : Bernard Fresson qui y joue un micro-rôle est, le pauvre, visiblement bon pour la réforme, l'âge aidant. Mais, lorsque on sait de qui s'inspire son personnage (de Stéphane Bourgoin, le fameux libraire parisien, écrivain et spécialiste des serial-killers) on est quelque peu hilare. Une faute de goût qui amusera les happy-few.

Photo 2 / cliquez

La réalisation

D'un rythme bien enlevé, ce film embarque malgré les grosses ficelles qui passent mieux par écrit grâce au talent d'Oppel et somme toute, on passe un bon moment de cinéma, car c'est correctement glauque et speedé. Pas de gore, pas de complaisance. Lumière très léchée et décors « déglingues » de première.

Le générique est même un modèle du genre ; de ceux qui vous installent le malaise alors que le film commence à peine. On pense au générique de Seven, c'est dire, alors qu'il n'y a pourtant absolument aucune ressemblance. Disons que pour celui Six-Pack, on voit évoluer des « matières organiques... »

Berberian a déniché des endroits impossibles, même plutôt surréalistes, pour situer la grande scène de final. qui elle vaut le détour.

Photo 5 / cliquez

Le bilan : faut-il y aller ? Va-t-il relancer le cinéma de polar français ? 

Répétons-nous : dans Six Pack, Oppel avait volontairement pompé tout les clichetons du film de SK ou du polar au cinéma (fête foraine, SK dans sa cellule et on en passe des tonnes) et les avait refourgué à sa sauce : ça fonctionnait très bien. Heureusement, suivant le Motard Barbu sur ce fil raide, Berberian n'a pas trébuché. Au point que même en ayant conscience des grosses ficelles, on ne les voit pas, quand on ne les accepte pas avec plaisir ! Alors ? Alors dans un paysage de polar français annihilé (kesse qu'il y a eu depuis à part L627 et Le Cousin ? Scènes de crime ? ) ce truc très honnête est une bonne nouvelle. Pour une fois ce n'est pas du téléfilm et ce n'est pas non plus un plagiat des studios américains (non, tout ne s'arrange pas à la fin à l'américaine !). Les 60 patates de budget se voient sans ostentation ni effets superfétatoires. Bref, Six Pack est un bon « produit » et un bon moment à passer au ciné. Pas indispensable pour qui va au cinéma une fois par an seulement, mais pour les réguliers c'est recommandable.
 

Francis Mizio envoyé spécial de Grandpuits Bailly Carrois, le « Cannes des champs de betteraves ».


Photo 6 / cliquez

 

L'Ours-Polar©Francis Mizio, 2000 | Entrée du site | Les photos (une par jour)