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Portrait d'auteur
l'ours-polar

Max Geneve

Portrait d'un franc-tireur

- L'histoire de Max Genève est une affaire de naissance. Notre homme est tout d'abord né Jean-Marie Geng. Sous cette identité, acquise à la naissance en 1945 (à une époque où précisément l'Europe renaît), il s'engage dans des études de philosophie et obtient une maîtrise en la matière. Par la suite, son doctorat en sciences sociales lui permet d'enseigner la sociologie, de 1973 à 1982. C'est également pendant cette période qu'il publie ses premiers livres, sous la forme de quatre essais (aujourd'hui encore, on trouve assez facilement Mauvaises pensées d'un travailleur social, initialement publié au Seuil en 77 et repris des années plus tard en collection de poche).

Jean-Marie Geng est né mulhousien, mais Strasbourg sera sa ville d'adoption. Il y vivra plus de quinze ans. La capitale alsacienne marque profondément ceux qui y ont vécu et l'oeuvre romanesque à venir ne manquera pas de rendre hommage, en de multiples occasions, à cette ville où l'auteur aime aujourd'hui à revenir sporadiquement. Mais pour que naisse l'oeuvre romanesque, il faut que Jean-Marie Geng devienne Genève. C'est clair, non ? Il ne s'agira pas d'une mue (l'homme n'est pas un reptile), ni d'une mutation (nous ne parlons pas ici de science-fiction), mais plutôt d'une re-naissance. Ceux qui souhaitent en savoir davantage sur le sujet peuvent se référer à La prise de Genève, acte de naissance officiel publié par Bueb et Reumaux en 1980. A l'époque où se précisait l'idée d'endosser le nom de Genève, j'avais perdu toute assurance de mon savoir antérieur. Je flottais, le sol jonché de convictions philosophiques et politiques mortes. Il est naturel que celui qui a perdu connaissance prenne le nom d'un lac intérieur. On le voit, la transformation n'avait rien d'un jeu, ni d'une futile coquetterie. Et l'oeuvre pouvait naître.

Le plus fidèle traducteur des préoccupations de l'auteur, c'est d'ailleurs l'oeuvre. Genève éprouve une grande passion pour la musique et la musique (pas seulement celle des mots) habite l'oeuvre de Genève. Quoi de plus normal ? Nombreux sont les livres qui en attestent : Le Compositeur (Flammarion, 1992), Le Château de Bela Bartók (Zulma, 1995), ou la participation au recueil Les treize morts d'Albert Ayler (Série Noire, 1996), première incursion de Genève dans le polar. Mais nous y reviendrons.

Max Genève aime à se définir comme un franc-tireur et le moins que l'on puisse dire, c'est que la définition n'est pas usurpée. L'homme a la conviction absolue et définitive que l'écriture ne souffre aucun compromis et il ne manque pas une occasion — comme les rencontres publiques, par exemple — pour rappeler cet axiome. Le Salon (Barrault, 1985) constitue en l'occurrence une illustration limpide de cette préoccupation : Genève, avec l'insolence et la puissante ironie qui le caractérisent, y fustige les comportements souvent boutiquiers et mesquins d'un (petit) milieu médiatico-littéraire, détestable parce que persuadé d'être le nombril du monde. Et Genève va, au rythme d'un livre par an, s'émanciper — autant qu'il est possible de le faire — de cette vaine agitation, par amour de la Littérature, qui est silence et réclame le silence, et de toute manière finit par retourner au silence...

Simon Rose est, quant à lui, né du désir de Max Genève d'écrire du polar. Genève avait déjà eu l'opportunité de se frotter au genre par le biais de la télévision : il est en effet l'auteur de deux épisodes de la série Le Lyonnais, diffusés sur France 2 en 90 et 92. Et de ce désir d'écriture noire est née tout spécialement en 95 la collection Quatre-Bis des éditions Zulma, par ailleurs fidèle à Genève depuis 93 (il y a déjà publié six romans, toutes collections confondues).

Depuis ce temps, Quatre-Bis s'est considérablement étoffée, permettant l'éclosion de nombreux talents, tels que Hugo Horst, Catherine Klein ou Emmanuel Ménard (pour plus de détails, voir l'Ours n°3 édition papier). Simon Rose est un détective privé hors-norme qui dort beaucoup (bien plus qu'un ours !) et vit chez sa mère. Il a une décapotable nommée Béatrice et un sérieux penchant pour les femmes (quoiqu'il ne faille voir aucun rapport entre les deux affaires). Son apparente décontraction n'empêche pas l'efficacité et Rose a, depuis 1995, dénoué quatre vilains sacs de noeuds. Ces désinvoltes exploits sont relatés dans Autopsie d'un biographe (Zulma, 1995), TEA (Zulma, 1997), Le tueur du 5 du mois (Série Noire, 1997) et Tigresses (Zulma, 1999). L'entrée en polar de Max Genève s'est donc plutôt bien passée et il y a fort à parier que les librairies verront fleurir de nouvelles aventures de Simon Rose, pour le plus grand plaisir du lecteur, cela va de soi...

Stéphane Laurent


Note : en dehors des quatre romans qui viennent d'être évoqués, Max Genève a déjà enrichi sa contribution au monde du polar de deux participations notables à des recueils collectifs : la nouvelle My name is Albert Ayler, parue dans Les treize morts d'Albert Ayler (Série Noire, 1996) est une des variations sur la mort mystérieuse du grand saxophoniste new-yorkais. On retrouve en outre Max Genève au sommaire de Villefranche, ville noire (Zulma, 1997), collectif publié à l'occasion du festival du roman noir de Villefranche-de-Rouergue.

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