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l'ours-polar |
Quelqu'un qui lit cette lamentable chronique (car il y a des
La daubologie s'est toujours voulue une science analytique. Il n'y a qu'en disséquant les faits, ou en leur en leur pressant les pustules (cette image correspond bien à notre sujet « photo », c'est le cas de le dire) qu'on en sort la substantifique moelle -soient ces petits tortillons blanchâtres un peu écoeurant qu'on connaît tous après une nuit d'abus en matières grasses ou en alcools frelatés. Aussi, disséquons ici que vous le vouliez ou non les divers aspects de la photo de 4e ; lesquels vont nous éviter d'investir dans des livres certainement daubiques.
Faisons d'abord des constats (accablants) : I) Les avantages dont bénéficie le lecteur sur l'éditeur. II) Les différents types de photos et leur signification daubologique. Posons-nous une question : III) Se fier sur la sale gueule de l'auteur pour écarter son livre, est-ce un délit ? Et tirons de ces constats des leçons pour l'avenir: IV) Quel rôle pour la photo de 4e ? Doit-on la garder ? V) Quelles peuvent être les apports des nouvelles technologies ? (Vous ne vous attendiez pas à celle-là, hein ?) | ![]() |
<------------ La fiche daubologie du bimestre à découper ------------>
LA PHOTO DE 4E DE COUVERTURE
I) Les avantages dont bénéficie le lecteur sur l'éditeur.
Lorsque l'auteur envoie son manuscrit par la poste à l'éditeur, il est rare qu'il y adjoigne une photo. Ce point, a priori mineur, est pourtant d'une importance cruciale. En effet, l'éditeur va devoir travailler en aveugle. Sachant qu'il est déjà rare que l'éditeur lise le livre qu'il va publier ou refuser, cette absence de la photo de l'auteur va ajouter aux effets pervers habituels du monde enchanté de l'édition. Voici quatre cas possibles :
a) - Le mec à une tronche qu'on aimerait pas croiser sur les quais de St Nazaire à quatre heures du matin (et n'a pas envoyé sa photo), mais son manuscrit (pas vraiment lu par l'éditeur qui le publie donc en ce cas en méthode dite de « double aveugle ») s'avère au final être un best-seller. Résultat : on se retrouve avec un best seller mais un écrivain qui a la tronche ravagée, -ce qui désespère l'attachée de presse qui doit faire passer l'auteur à Nulle Part Ailleurs, déprime la maquilleuse et agace les bellâtres écrivaillons concurrents. Exemple... (Oh puis non, on va dire que j'ai de la rancœur). Ce cas de figure (cas de le dire, 2e) est certes rare, et la tronche de l'auteur, par un mystérieux effet incompréhensible devient alors un argument de vente supplémentaire : c'est l'écrivain destroy et schyzotrope. Tellement authentique.
b) Le mec a une sale gueule et son bouquin est à chier. L'éditeur, qui fonctionne toujours en double aveugle, le publie. La tronche de l'écrivain qui pouvait alors alimenter alors nos soupçons, les confirme. Il avait vraiment la tête à écrire comme un pied. Vous imaginez pas que je vais donner un exemple pour ce cas extrême (quand même). En tout cas, la critique s'enflamme tout de même, parce qu'on a tous vu Elephant Man et qu'un manque de bol pareil c'est à pleurer, tout de même. On ne peut pas le laisser comme ça...
c) Le mec qui a écrit un roman nullissime est au final super beau gosse (ou la nana est une super pépée). C'est une bonne surprise pour l'éditeur : cet auteur sera médiatique et charmant. Son livre se vendra, bien qu'il soit daubique +++. A des considérations sur sa plastique, s'ajouteront des envolées lyriques « sur la hardiesse de sa littérature et son ton novateur ». C'est vendu. Mettons en exemple, tiens, toutes les petites jeunes de la dernière rentrée littéraire, de septembre 1999. Je vous fais un lot.
d) Le type (ou la fille) est super beau gosse et son bouquin est un chef d'oeuvre. L'éditeur qui fonctionne en double aveugle à donc une chance de cocu. Je ne peux pas donner de noms précis, mais tenez-vous au courant des ragots du monde de l'édition.
Bref, le lecteur (ou plutôt le futur acheteur du livre daubique -soit les cas ci-dessus b et c) a un avantage sur l'éditeur, c'est que grâce à la photo de 4e, il peut se faire une opinion sans risque. L'éditeur, on l'a vu, vend ses trucs de toute façon (quoiqu'il y ait prise de risque, comme ils disent) et du coup, il est vrai il n'a pas plus besoin d'avoir au départ la photo de l'auteur que de lire le manuscrit (ceci doit expliquer pourquoi l'usage des photos avec manuscrits s'est peu répandu). Mais du point de vue du lecteur, il s'agit d'acheter, et c'est tout-à-fait différent. Il y a bien risque. La photo de 4e, pour le lecteur est un critère d'envoi au DaubatorTM très fort. Il faut, camarades ne pas hésiter à en user.
Apprenons donc à les décrypter.
II) Des différents types de photos et leur signification.
a) Le portrait.
La photo de 4e de couverture est souvent un portrait, souvent périmé (L'auteur a en réalité 20 ans de moins sur la photo que dans la vie, photo à comparer avec la date de naissance ou l'âge précisés dans le texte de présentation).
Hormis l'inconvénient qu'en dédicaces on lui demande si son fils viendra dédicacer aujourd'hui, ou on lui fait sans cesse remarquer qu'on ne l'imaginait pas comme ça, cela peut signifier que :
- 1 - L'auteur est plus âgé que sur la photo. Méfiance. Sa littérature n'est peut-être pas de la toute première fraîcheur. il est peut-être en fin de course.
- 2 - L'éditeur n'a pas fait faire de nouvelle photos. Méfiance. Il n'a pas dû non plus dépenser d'argent pour le poste "corrections".
- 3 - L'auteur fait sa coquette. Méfiance. Il est probable alors qu'il se prenne pour un grand écrivain, qu'il ait une image faussée de lui-même.
- 4 - L'auteur est mort. Méfiance : comment cela se fait-il que c'est une nouveauté ? Ne serait-ce pas plutôt un fond de tiroir.
Autres considérations (enlevons le problème des prises de poids pour ne pas vexer Hugues Pagan) :
- 5 - L'auteur est laid et il écrit sur la beauté du monde. Méfiance : il n'y connnaît peut-être rien.
- 6 - L'auteur est beau et il écrit sur l'alcoolisme dans les bas-fonds et la misère de sa famille. Méfiance : il bidonne, sinon il aurait des stigmates. On nous la fait pas.
- 7 - L'auteur a vraiment une sale gueule et il écrit destroy. Méfiance, il risque de rabâcher ses petites misères. Il en veut à la Terre entière. On s'en fout de ses problèmes, on a les nôtres.
- 8 - L'auteur est bouffi, alcoolo et a un oeil en moins. C'est Jim Harrison. Vous pouvez y aller.
- 9 - L'auteur ressemble à James Crumley. C'est James Crumley. Vous pouvez y aller.
- 10 - L'auteur ressemble à James Crumley, mais ce n'est pas James Crumley. Vous pouvez y aller, c'est Patrick Raynal. Mais ne faites pas comme moi, n'allez pas lui dire. Il se vexe et c'est vrai que j'ai dit une connerie ce jour-là, ce n'était pas très malin. Mais je suis spontané.
- 11 - L'auteur semble sortir de tôle ou avoir été photographié à l'identité judiciaire. Là, c'est simple, c'est qu'il s'appelle Mouloud Akkouche et qu'il n'a pas eu de bol, lors de la prise de vue et à la maquette. C'est son destin et on n'y peut pas grand chose malheureusement, faudra encore quelques générations pour qu'on s'y fasse. On souhaite sincèrement plus de chance à ses gosses.
- 12 - L'auteur ne se distingue pas tellement sur la photo noir et blanc. C'est soit Bolya, soit Achille N'Goye. C'est un problème de tirage au labo, ça ne veut strictement rien dire.
- 13 - L'auteur est poilu (et barbu). C'est sûrement un auteur de chez Rivages qui écrit des thrillers et fait de la moto, ça se voit à l'écrasement de sa chevelure abondante. (Non, ce n'est pas Mercado, il a les cheveux courts et puis il ne tiendrait pas dans le cadre).
- 13 - L'auteur a fourni un photomaton, a une tête de nazi (ou de membre du Comité Central) et semble en colère contre l'industrie du brocolis en purée surgelée. Il dégage une morosité communicative et/ou une rigueur stalinienne. Très bizarrement, il y a marqué "meilleur humoriste de sa génération". Méfiance : c'est moi.
- 14 - L'auteur est une homme, mais après un examen attentif, on s'aperçoit que c'est une femme. Ne cherchez pas, c'est…
Enfin bref. On ne va pas tout lister quand même, ça serait trop long entre les indices daubiques et non-daubiques, les « faux amis », les confusions possibles, etc. C'est juste pour vous dire que le portrait à une importance déterminante pour l'évaluation du livre, il ne faut pas le négliger avant de balancer l'ouvrage au DaubatorTM.
b) La photo en « portrait américain ».
- 1- L'auteur s'appuie sur une main. Il semble s'emmerder, s'endormir. Méfiance : cette photo a peut-être été prise au moment où il relisait ses épreuves.
- 2 - L'auteur est assis à son bureau en train d'écrire sur une page blanche. Il y a un presse-papier en forme de petit chien en faïence de Gien. Méfiez-vous, c'est peut-être bien Maurice Rheims et ce n'est donc pas du polar et si ça c'est pas DaubatorTM alors je rends ma chaire de Daubologie.
-3 - L'auteur est une femme, et elle a de très beaux seins qu'elle montre avec ostentation. Méfiance : il s'agit là d'une stratégie dite de la "vitrine". Chacun sait que les charcutiers parviennent à un taux de vente de 56,43 lorsqu'ils exposent dans leur étal de la poitrine fumée plutôt que du paté de tête (qui n'obtient qu'un piètre 42,71)
III) Se fier sur la sale gueule de l'auteur pour daubatoriser un livre, est-ce un délit ?
(une question de monsieur M.G. D. de Montréal).
En vérité, cher lecteur, je ne crois pas que cela soit répréhensible. Comme tu as le droit de ne pas aimer un livre, tu as le droit de ne pas l'acheter en tenant compte des critères qui te sont propres. Dis-toi bien, par ailleurs que si les auteurs avaient en main les photos de tous leurs lecteurs, il serait probable qu'ils seraient eux aussi terrorisés. Le monde est pluriel, comme le gouvernement, et de la même façon, il nous faut faire avec. Voilà, merci de m'avoir écrit et n'oublie pas de renouveler ton abonnement.
L'ours en Daube
LA PHOTO DE 4e de COUVERTURE : DES LECONS POUR L'AVENIR
IV) Quel rôle pour la photo de 4e ? Doit-on la garder ?
OUI. Ne serait-ce parce que c'est drôle de faire des comparaisons pendant les séances de dédicaces.
V) Quelles peuvent être les apports des nouvelles technologies ?
(une question de monsieur M.G. D. de Montréal, qui se présente comme
En vérite, cher lecteur les nouvelles technologies vont nous apporter beaucoup en terme d'identification daubique via la photo de 4e de couverture. Imagine ce que nous réserve l'avenir, et pense que demain est déjà là :
- La photo 3D à matrice schyzotrope
Elle permettra de voir à la couperose (en millions de couleurs) ou aux clairs-obscurs (effets de reliefs en 256 niveaux de gris) si l'auteur picole ou si ses cicatrices sont dues à une vie dissolue plutôt qu'une acné juvénile jadis mal soignée.
- L'hologramme
En tournant le livre, dans le cas un hologramme en pied, l'auteur te montrera le bas de son dos. Il te suffira de shooter du pied dans la quatrième de couverture pour lui signifier ton désarroi devant son écriture novatrice mais néanmoins courageuse. Le livre finira son vol plané dans le DaubatorTM.
- La vidéo
L'apport du son sera déterminant. Tu l'entendras dire les niaiseries qui sont habituellement écrites sur la quatrième de couverture. Si l'auteur à des tics, tu reconnaîtras alors aisément un livre de mémoires de Vincent Lindon égaré dans le rayon polar.
- Le sensorama Enfin, les techniques de transmission moléculaires qui permettront demain (car c'est pour demain) de transmettre des effluves, des parfums, etc te permettront d'évaluer si l'auteur refoule ou pas du goulot, s'il sent ou pas la vinasse (ce qui signifie dans l'affirmative qu'il va souvent en festival et est donc un auteur populaire en lequel tu peux donc placer toute ta confiance). Voilà, merci de m'avoir écrit et n'oublie pas de renouveler ton abonnement. L'ours en Daube Enfin, pour conclure ce nouveau pan de la science daubologique, notons pertinement que pour certaines daubes, y'a vraiment pas photo. |
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Francis Mizio