![]() |
accueil | |
![]() | |
l'ours-polar |
Le polar Marseillais... L'avis d'un homme du Nord
par Noël Simsolo
En bon autodidacte, je me suis toujours méfié des écoles, des maîtres à l'affût de disciples et d'élèves soucieux de suivre les chemins tracés par la théorie. Même si, en musique, l'Ecole de Vienne, en littérature, le mouvement surréaliste, en peinture, l'impressionnisme furent décisives, je pense que ce sont les créateurs qui ont compté, pas le fait qu'ils appartiennent à une école.
Apocalypse Nord
l'un des ouvrages de N. Simsolo chez Baleine
J'ajoute avoir toujours été peu convaincu par l'utilisation du terme : polar. En ce qui concerne mes petits travaux, je les considère comme des romans noirs et si j'ai dirigé une collection intitulée Instantanés de Polar, ce n'est pas moi qui avait décidé de ce label. Il était déjà accolé à cette collection. J'y cherchais d'abord des écrivains.
A partir de ce constat, il m'est difficile de répondre à votre enquête sur le polar marseillais. D'abord, Izzo aurait été un aussi bon écrivain s'il avait vécu à Lyon, Strasbourg ou Chaumont. La matière de ses romans aurait été un peu différente, mais le style et le talent seraient restés intacts. Que Marseille soit son personnage central a sans doute aidé à son succès médiatique, car Marseille est une ville particulière avec ses mythologies anciennes ou modernes, de Borsalino à l'O.M., de la trilogie de Pagnol à Gaston Defferre, de sa colonisation corse à son accueil des pieds-noirs etc, etc...
Cocteau disait « la mode, ça se démode ! ». Méfions-nous des chroniqueurs perméables au snobisme. Les auteurs marseillais démarquant Izzo ne sont pas plus intéressants que ceux qui ne pensent qu'à utiliser un folklore pour touristes ou qui jouent avec une belle impudeur d'une complicité bien calculée avec le public local. Sans style personnel ou ingéniosité de leurs intrigues, leur succès ne vient que d'une mode. Ils en sont les profiteurs tout autant que les otages. L'âme d'une ville ou d'une région, c'est autre chose. Un auteur peut être inspiré par sa ville ou sa région, à condition d'y avoir sa propre histoire et de l'intérroger ; et non d'accumuler les poncifs et les stéréotypes.
Je n'ai aucune envie d'aligner des notes et des comptes-rendus de lecture. Affirmer que tel écrivain est un bon et que tel autre est mauvais à l'intérieur de cette nébuleuse qu'on appelle le polar marseillais, ce serait infecte.
Responsable de la publication de quelques écrivains résidant dans le Nord et auteur moi-même de romans se situant souvent à Lille, je crois pas davantage à une école de polars nordistes. Facon et Delpierre situent leurs récits dans la région où ils vivent. Ils ne sont pas les seuls. Il y a aussi Quint, Turbé et quelques autres... Tous sentent (à leur façon) l'âme du Nord, mais leur univers et leur travail dépassent cet aspect documentaire et sentimental, car ils ne cherchent pas à suivre un concept régionaliste.
Le danger des écoles et des fichages médiatiques est bien là. Imposer un concept, comme ça existe pour les séries T.V. ou les émissions de radio. Il n'y a pas de liberté de création véritable dans ces conditions. Ce qui compte, c'est le style et le regard de l'écrivain sur le réel ou les effets de réel. Tout le reste n'est que phénomène de modes, impulsion narcissique par l'écrit ou opportunisme commercial. Et ça me dégoûte.
Noël Simsolo, auteur et directeur de collection chez Baleine.
Interviewés : le polar Maseillais
Annie Barrière | Philippe
Carrese
Cédric Fabre | Jimmy
Gallier | François Thomazeau